Nous sommes dix, huit adultes et deux enfants de moins de trois ans, confinés dans une maison au milieu des bois. Ton amie chômeuse raconte son expérience communautaire.
Jeudi 26 mars
La communauté développe ses talents manuels de manière spectaculaire. Le Paon est totalement en roue libre. Après avoir construit une cabane et un bateau dans le jardin, il a fixé une tringle dans la chambre de la Perruche et du Canard pour qu’ils puissent y pendre leurs vêtements.
« Ne jette pas ce carton, on peut en faire un théâtre de marionnettes pour les enfants », lance-t-il au Chien qui fait du tri dans le hangar.
Le Lion débroussaille du matin au soir, sans jamais se départir de son style – mini-short et bottes en caoutchouc, on dirait Kate Moss avec un sécateur.
Le potager, quant à lui, vit désormais sous la protection d’un épouvantail que les enfants ont baptisé « La Fille ».
De l’avantage d’être en présence d’un confrère journaliste spécialisé en politique, nous bénéficions de conseils inattendus pour maximiser nos chances de succès pour le cultiver.
« – Il parait qu’il faut couper les courgettes, sinon c’est trop envahissant.
– Qui t’a dit ça ?
– Isabelle Balkany. Elle est hyper calée en cucurbitacée. »
Pour ma part, je rends hommage à ma clairvoyance. M’étant aperçue depuis longtemps de mon manque d’intelligence pratique, je me suis offert des cours de bricolage à Paris. J’y ai appris des rudiments de plomberie, mais surtout d’électricité, qui m’ont donné le courage de m’atteler à l’événement grave qui a frappé la communauté : la panne du four.
Le Chien a tiré la cuisinière, et nous avons découvert que la prise de courant avait fondu et que nous nous apprêtions tranquillement à foutre le feu à la baraque.
Le souvenir du visage bienveillant de Jean-Claude, mon prof de bricolage, m’a accompagnée tout au long de ma périlleuse entreprise. Lorsque le four s’est remis en marche, je me suis sentie gonflée de fierté ; la communauté reconnaissante m’a réservé un triomphe. J’ai dédié la prière du soir à Jean-Claude le prof de bricolage.
Dimanche 29 mars
Au premier jour de notre cohabitation, nous avons institué ce que nous avons appelé « la République démocratique du larbinat », régime selon lequel un binôme s’occupe de toutes les tâches domestiques de la journée avant de passer la main, à minuit, au binôme suivant. Alors que notre deuxième semaine ensemble s’achève, nous entamons notre quatrième journée de larbinat.
Officiellement, personne ne conteste le système ; nous rivalisons d’ingéniosité pour épater la galerie avec des recettes originales. Le Lièvre a cuisiné le maïs sous toutes les formes imaginables, le Cygne a décoré la table avec des bouquets de fleurs, le Canard a fait le ménage avec zèle, allant même jusqu’à astiquer les poutres.
Mais par delà l’image d’Épinal, certains commencent à montrer des signes de fatigue. De larbin à larbin, penchés au-dessus des fourneaux, on échange des conseils pour s’économiser. « Moi aussi j’étais au bout de ma vie à la fin de la 3ème journée de larbinat. Je pense qu’il faut faire des plats simples, au moins pour le déjeuner, sinon c’est trop dur », conseille le Cygne, encore éprouvée par la confection d’une trentaine de galettes de maïs.
Alors qu’à 23h, le Lion hisse le drapeau blanc et va se coucher, son co-larbin va chercher la serpillère en marmonnant que ce n’est pas une heure pour faire ça et qu’on ne l’y reprendra plus. Il est aussi l’auteur de cette phrase mémorable, lancée quelques heures plus tôt à un camarade qui lui recommandait de faire une petite pause : « Et le crumble, tu crois qu’on va le sortir de notre boulard ? ».
Le larbinat va-t-il se fissurer ? L’épouvantail va-t-il épouvanter les oiseaux ? Peut-on mourir d’une overdose de maïs ?
La suite au prochain épisode.
Je suis fan
J’attends avec impatience la suite
Bises des hauts de France
je deviens fan moi aussi, attention addiction en vue!!!
Coucou, tu as un sacré talent, je lis tes aventures et je me marre, et du coup j’apprends que tu es maman, super ! Grosses bises ma belle et prends bien soin de toi 🙂